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BELGICATHO

  • Quand tout est consommé

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    (L'empreinte du visage de Jésus sur le Saint Suaire de Turin)

    Le seul irréparable malheur est de se trouver un jour sans repentir

    devant la face qui pardonne.

    Georges BERNANOS

  • La Passion du Christ selon le Saint Suaire de Turin

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    Du Frère Bruno Bonnet-Eymard (source) :

    La Passion du Christ selon le Saint Suaire de Turin

    LES PLAIES DU CHRIST

    « PILATE PRIT JÉSUS ET LE FIT FLAGELLER. » (JN 19, 1)

    Silhouette dorsale du Saint Suaire
    Silhouette dorsale

    La flagellation du Seigneur, personne ne l'avait imaginée dans toute son ignominie, telle que nous la voyons ici représentée. Peut-être le laconisme des Évangélistes s'explique-t-il par l'horreur que leur inspirait le souvenir de ce supplice infligé à Jésus (Mc 15, 15 ; Mt 27, 26 ; Jn 19, 1). Selon les témoignages littéraires, le condamné était entièrement dévêtu et attaché à une colonne. C'est pourquoi on parle traditionnellement de “ la colonne de la flagellation ”. Mais si Jésus avait eu ainsi les bras élevés, attachés au sommet d'un fût de colonne, il aurait eu au moins la poitrine à l'abri des coups. Ici nous voyons les coups pleuvoir sur les épaules, sur le dos, les reins, les cuisses, les mollets ; mais aussi par-devant : nous en comptons les traces sur la poitrine et sur la face antérieure des jambes.

    Le flagrum, un manche avec deux ou trois lanières lestées de petites haltères en plomb, était manié par un bourreau qui tournait autour de sa victime, ou bien par deux bourreaux, dont l'un frappait à revers. Jésus a perdu beaucoup de Sang, pour une raison que saint Luc est le seul à mentionner, « avec une précision de clinicien tout à fait indépassable », écrit le docteur Barbet ; peut-être parce qu'il avait interrogé saint Jean, le disciple bien-aimé qui ne dormait pas au mont des Oliviers :

    « Entré en agonie, il priait de façon plus instante, et sa sueur devint comme de grosses gouttes de sang qui tombaient à terre. » (Lc 22, 44)

    Barbet reconnaissait les symptômes de l'hématidrose, phénomène clinique rare, mais bien connu des médecins, causé par un profond ébranlement moral, précisément celui dans lequel nous voyons Notre-Seigneur plongé au cours de l'agonie de Gethsémani, lorsqu'Il prévoit d'avance, dans le détail, les souffrances qui L'attendent ; et surtout lorsqu'Il se remémore la masse effroyable de NOS péchés, et qu'Il s'en revêt en présence de son Père, les prenant sur Lui pour les expier. Une agonie morale, un combat mortel entraîne ce symptôme physiologique d'une hémorragie sous-cutanée : le sang se mêle à la sueur et forme avec elle des petites boules sortant par les pores de la peau et roulant littéralement sur l'ensemble du corps, « roulant jusque par terre », écrit saint Luc.

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  • Méditation pour le Vendredi Saint

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    Du site de l'Opus Dei :

    Méditation : Vendredi Saint

    Les thèmes proposés pour la méditation du jour sont : Jésus a souffert sa Passion par amour pour nous ; se tenir tout près de Jésus dans son agonie ; sur la Croix, nous trouvons notre refuge et notre salut

    - Jésus a souffert sa Passion par amour pour nous

    - Se tenir tout près de Jésus dans son agonie

    - Sur la Croix, nous trouvons notre refuge et notre salut


    « MON DIEU, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Mt 27, 46). « Jésus a éprouvé l’abandon total, la situation qui lui est la plus étrangère, afin de nous être solidaire en tout. Il l’a fait pour moi, pour toi, pour nous tous, il l’a fait pour nous dire : “N’aie pas peur, tu n’es pas seul. J’ai éprouvé toute ta désolation pour être toujours à ton côté” » [1]. Ce qui surtout l’afflige, c’est la souffrance dont nous autres hommes et femmes de toutes les époques nous faisons l’expérience, comme conséquence du péché : « Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants ! » (Lc 23, 28)

    Il n’est pas de douleur pouvant pousser le Christ à renoncer à sa volonté de nous sauver. « Ses bras cloués s’ouvrent pour chaque être humain et nous invitent à nous approcher de lui, certains qu’il nous accueille et nous embrasse avec une tendresse infinie » [2]. La liturgie du Vendredi Saint commence par la prostration du célébrant. C’est ainsi que Jésus se trouvait au Jardin des Oliviers. Tous les péchés des hommes pesant sur lui, il s’adresse à Dieu le Père afin d’obtenir de lui la force nécessaire pour affronter cette échéance décisive.

    Jésus est venu sur terre pour réparer le mal que nous nous sommes infligés à nous-mêmes et infligé aux autres. Il souhaite nous rendre la liberté et la joie. Son amour pour nous n’a pas de limite, si bien que « son joug est facile à porter, et son fardeau, léger » (Mt 11, 30). Ce ne sont pas nos péchés qui ont le dernier mot si nous laissons Jésus parler, nous dire qu’il nous aime et qu’il ne nous reproche pas des souffrances si atroces. Nous nous rappellerons aujourd’hui que « Jésus est tombé pour que nous nous relevions : une fois et toujours » [3].


    UN DES MOTIFS du péché est de penser, à tort, que la volonté de Dieu suppose un risque pour notre liberté. Ce qui, par exemple, est arrivé à Adam, notre premier parent. Il n’en est rien car Dieu veut que nous soyons heureux, que nous lui permettions de nous aimer. « Nous sommes libres seulement quand nous sommes dans notre vérité, quand nous sommes unis à Dieu. Alors, nous devenons vraiment “comme Dieu”, non pas en nous opposant à Dieu, non pas en nous débarrassant de lui ou en le reniant. Dans la lutte durant sa prière sur le Mont des Oliviers, Jésus a dénoué la fausse contradiction entre l’obéissance et la liberté, et il a ouvert le chemin vers la liberté. Demandons au Seigneur de nous introduire dans ce “oui” à la volonté de Dieu et de nous rendre ainsi vraiment libres » [4].

    Quel n’est pas notre désir de remercier le Seigneur pour son sacrifice, volontairement accepté, afin de nous délivrer de la mort ! Jésus-Christ entre en agonie et va jusqu’à verser des gouttes de sang ; or, la confiance en son Père ne défaille pas, il prie sans arrêt. « Il s’approche de nous, qui sommes endormis : levez-vous et priez — répète-t-il — pour ne pas entrer en tentation » [5]. Quelques heures plus tard, la furie des péchés de l’humanité tout entière déverse ses coups sur le corps innocent de Jésus-Christ. L’ingratitude de notre cœur le serre dans sa solitude. « Toi et moi, nous sommes incapables de parler. — Les mots sont inutiles. — Regarde-le, regarde-le… lentement » [6].

    « Parfois il nous semble que Dieu ne répond pas au mal, qu’il demeure silencieux. En réalité Dieu a parlé, a répondu, et sa réponse est la Croix du Christ : une Parole qui est amour, miséricorde, pardon. Elle est aussi jugement : Dieu nous juge en nous aimant. Rappelons-nous cela : Dieu nous juge en nous aimant. Si j’accueille son amour je suis sauvé, si je le refuse je suis condamné, non par lui, mais par moi-même, parce que Dieu ne condamne pas, lui ne fait qu’aimer et sauver » [7].


    LES PLAIES du Seigneur, par lesquelles son très précieux sang a coulé à flots, seront le refuge serein de nos blessures. Dans ses plaies nous nous sentons davantage en sécurité. Imbibés de son sang rédempteur, ivres de Dieu, nous ne devons avoir peur de rien. « En admirant et en aimant vraiment la Très Sainte Humanité de Jésus, nous découvrirons ses plaies une à une. […] Nous aurons besoin de nous introduire dans chacune de ces très saintes blessures : pour nous purifier, pour nous réjouir dans ce sang rédempteur, pour nous fortifier. Nous accourrons comme ces colombes qui, au dire de l’Écriture, se blottissent dans les anfractuosités des rochers à l’heure de la tempête. Nous nous cachons dans ce refuge, pour trouver l’intimité du Christ » [8].

    Dans notre contemplation, nous n’aurons pas de mal à savourer la tendresse forte avec laquelle l’Église chante aujourd’hui : « Douceur du bois, qui d’un doux clou, porte un si doux fardeau » [9]. La croix « est le signe lumineux de l’amour, et même de l’immensité de l’amour de Dieu, de ce que nous n’aurions jamais pu demander, imaginer ou espérer : Dieu s’est penché sur nous, s’est abaissé jusqu’à parvenir dans le coin le plus sombre de notre vie pour nous tendre la main et nous attirer à lui, nous ramener jusqu’à lui » [10]. Voilà la vérité du Vendredi Saint : sur la Croix, le Christ, notre rédempteur, nous a rendu la dignité qui nous est propre. Nos désirs de nous clouer volontairement sur la croix s’en trouvent renforcés, de nous associer à sa rédemption, faisant en sorte que notre faiblesse soit lavée dans le sang qui jaillit du corps de Jésus.

    Au terme de ce moment de prière, notre regard se tourne vers le pied de la croix où se trouve la Mère des Douleurs, accompagnée de plusieurs femmes et d’un adolescent. Ceux qui ont connu ce genre de circonstances savent bien qu’aucune douleur n’est comparable à celle-là. Le Christ, en ce moment, avait besoin d’elle tout près de lui et nous, nous en avons besoin davantage encore.


    [1]. Pape François, Homélie, 5 avril 2020.

    [2]. Benoît XVI, Paroles à la fin du Chemin de Croix, 21 mars 2008.

    [3]. Saint Josémaria, Chemin de Croix, IIIe station.

    [4]. Benoît XVI, Homélie, 5 avril 2012.

    [5]. Saint Josémaria, Saint Rosaire, n° 6.

    [6]. Saint Josémaria, Saint Rosaire, n° 7.

    [7]. Pape François, Paroles à la fin du Chemin de Croix, 29 mars 2013.

    [8]. Saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 302.

    [9]. Adoration de la Sainte Croix, Hymne Crux fidelis.

    [10]. Benoît XVI, Paroles à la fin du Chemin de Croix, 22 avril 2011.

  • Vendredi Saint : les impropères

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    1 – O mon peuple que t’ai-je fait ?
    En quoi t’ai-je contristé ?
    Réponds-moi !

    2 – T’ai-je fait sortir du pays d’Egypte,
    T’ai-je fait entrer en Terre Promise,
    Pour qu’à ton Sauveur,
    Tu fasses une Croix ?

    3 – T’ai-je guidé quarante ans dans le désert
    Et nourri de la manne,
    Pour qu’à ton Sauveur,
    Tu fasses une Croix ?

    4 – Moi, je t’ai planté, ma plus belle vigne,
    Et tu n’as eu pour Moi que ton amertume
    Et du vinaigre pour ma soif !

    5 – Moi, j’ai pour toi frappé l’Egypte,
    J’ai englouti dans la mer Pharaon et son armée !
    Toi tu M’as livré aux grands-prêtres et les soldats M’ont flagellé !

    6 – J’ai ouvert devant toi les eaux de la mer ;
    Toi, de ta lance, tu M’as ouvert le cœur !
    Je t’ai arraché à l’abîme des eaux
    Et tu M’as plongé dans l’abîme de la mort !

    7 – Moi, aux eaux vives du Rocher, je t’ai fait boire le salut ;
    Toi, tu Me fis boire le fiel, et tu M’abreuvas de vinaigre!

    8 – Devant toi, j’ai fait resplendir ma Gloire,
    Dans le buisson ardent et la colonne de nuée ;
    Et tu M’as tourné en dérision et vêtu d’un manteau de pourpre !

    9 – Pour toi, j’ai frappé l’Egypte et sa puissance,
    J’ai fait de toi mon peuple, un peuple de rois ;
    Et tu M’as couronné la tête d’une couronne d’épines !

    10 – Moi, Je t’ai exalté par ma toute  puissance ;
    Toi, tu M’as pendu au gibet de la Croix !
    Je t’ai choisi parmi toutes les nations ;
    Toi, tu M’as rejeté hors des murs de Jérusalem !

  • Chants grégoriens pour le Vendredi Saint

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    Graduale Graduel
    Phil. 2, 8-9 Phil. 2, 8-9
    ℟. Christus factus est pro nobis obédiens usque ad mortem, mortem autem crucis. ℣. Propter quod et Deus exaltávit illum: et dedit illi nomen, quod est super omne nomen.

    ℟. Le Christ S'est fait pour nous obéissant jusqu'à la mort, et la mort de la croix. . C'est pourquoi Dieu L'a élevé, et Lui a donné le nom qui est au dessus de tout nom.

    Passio Domini nostri J.C. sec. Johannes (Evangelium Passionis et Mortis Domini)

    Impropères

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  • Vexilla Regis prodeunt

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    Le Vexilla Regis est l’hymne du temps de la Passion et des fêtes de la Sainte Croix. Son texte (comme celui du Pange lingua du Vendredi Saint) fut composé par l’hymnographe saint Venance Fortunant au VIème siècle, à l’occasion de la réception solennelle des reliques de la vraie Croix à Poitiers par la reine de France sainte Radegonde.

    Vexilla regis prodeunt

    fulget crucis mysterium
    quo carne carnis conditor
    suspensus est patibulo.

    Quo, vulneratus insuper
    mucrone diro lanceae
    ut nos lavaret crimine
    manavit unda et sanguine.

    Arbor docora et fulgida,
    ornata regis purpura,
    electa digno stipite
    tam sancta membra tangere !

    Beata, cuius brachiis
    saecli pependit pretium ;
    statera facta est corporis
    praedam tulitque tartari.

    Salve, ara, salve victima,
    de passionis gloria,
    qua vita mortem pertulit
    et morte vitam reddidit !

    O crux, ave, spes unica !
    hoc passionis tempore
    piis adauge gratiam
    reisque dele crimina.

    Te, fons salutis, Trinitas,
    collaudet omnis spiritus ;
    quos per crucis mysterium
    salvas, fove per saecula.

    Les étendards du roi s'avancent
    mystère éclatant de la croix
    au gibet fut pendue la chair
    du créateur de toute chair.

    C'est là qu'il reçut la blessure
    d'un coup de lance très cruel
    et fit jaillir le sang et l'eau
    pour nous laver de nos péchès.

    Arbre dont la beauté rayonne,
    paré de la pourpre du roi,
    d'un bois si beau qu'il fut choisi
    pour toucher ses membres très saints !

    Arbre bienheureux ! À tes branches
    la rançon du monde a pendu !

    Tu devins balance d'un corps
    et ravis leur proie aux enfers !

    Salut, autel ! Salut, victime
    de la glorieuse passion !
    La vie qui supporta la mort,
    par la mort a rendu la vie.

    O croix, salut, espoir unique !
    En ces heures de la passion
    augmente les grâces des saints,
    remets les fautes des pécheurs.

    Trinité, source salutaire,
    que te célèbre tout esprit ;
    ceux que tu sauves par la croix,
    protège-les à tout jamais.

  • Ce crucifix qui donne véritablement à voir les dernières minutes de l’agonie du Christ avec un luxe de détails véridiques

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    D'Anne Bernet sur le site "1000 raisons de croire" :

    Le crucifix de Limpias donne à voir l’agonie de Jésus

    À Limpias, dans la province de Cantabrie (Espagne), se trouve depuis 1756 un admirable crucifix, très réaliste, trésor des collections de l’église Saint-Pierre. En 1919, alors que débute le carême, tout le monde ou presque est indifférent à ce crucifix et à son histoire. Ce carême à Limpias va s’avérer prodigieux, au sens propre du terme, le crucifix donnant véritablement à voir les dernières minutes de l’agonie du Christ avec un luxe de détails véridiques.

    Crucifix de Limpias / © Jose33luis, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons.
    Crucifix de Limpias / © Jose33luis, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons.
    Les raisons d'y croire :
    • Cinq ans auparavant, en août 1914, alors que l’on installe l’électricité dans le sanctuaire, un fait curieux se produit. Un religieux de l’ordre des Pauliniens, frère Antonio Lopez, monté sur une échelle pour régler l’éclairage du crucifix, se trouve à hauteur du visage du Christ et se rend compte, stupéfait, que les yeux de l’image familière, d’ordinaire ouverts et levés vers le Ciel avec une expression de supplication douloureuse, se sont fermés, comme le feraient les yeux d’une personne vivante éblouie par une lueur trop vive. La surprise du religieux est telle qu’il en tombe de l’échelle et reste un moment à terre, sonné. D’en bas, il constate que les paupières du Christ sont toujours baissées ; elles le restent environ cinq minutes.
    • Frère Antonio imagine si peu un phénomène miraculeux que sa première réaction, en reprenant ses esprits, est de prévenir ses supérieurs de son accident et d’aller consulter un médecin. Mais là, à l’étonnement général, bien que le religieux soit tombé d’une bonne hauteur sur le coin de l’autel, le praticien ne constate aucune blessure, ni externe ni interne. Frère Antonio se sort de cette chute, qui aurait pu le tuer, avec seulement de « petits hématomes ».
    • Toujours à la recherche d’une explication rationnelle, frère Antonio remonte sur l’échelle voir de plus près de quoi il retourne. Il pense à l’existence d’un mécanisme caché dans la statue, qui permettrait aux yeux de s’ouvrir et se fermer, mais ses investigations obstinées et répétées restent vaines ; il ne trouve aucun ressort, ni quoi que ce soit d’autre, et ce n’est pas faute d’avoir appuyé sur les paupières et les globes oculaires ! Ses supérieurs lui demandent un récit écrit des événements, puis lui imposent le silence sur son aventure, de sorte que l’affaire n’est plus évoquée.
    • Personne n’est donc au courant de cette histoire lorsque, le 30 mars 1919, à l’issue de la messe, le père Jalon, présent dans le confessionnal, est dérangé par une fillette qui prétend avoir vu le crucifié fermer les yeux. Il renvoie gentiment l’enfant mais, dans les minutes qui suivent, d’autres enfants viennent lui dire la même chose. Le capucin croirait à une farce collective orchestrée par les garnements si un adulte, puis plusieurs, ne lui signalaient aussi la chose.
    • Le religieux et son confrère, père Agatangelo, décident d’aller voir ce qu’il en est et constatent que les yeux du Christ sont ouverts, dans leur attitude habituelle, mais le père Jalon, en y regardant mieux, a l’impression de voir de la sueur ruisseler le long du corps du Christ. Troublé, il monte voir et constate que, du corps torturé, coule en effet ce qui ressemble à une sueur d’agonie… Il en a les mains trempées. Devant ce signe tangible, les ecclésiastiques ne savent que dire ni que faire. Déconcerté, le père Jalon décide de passer la nuit dans l’église. Alors qu’il est en prière, il constate à son tour le phénomène : le Crucifié ouvre et ferme les yeux. Eu égard à la méfiance des deux capucins et à leur incrédulité, il est impossible de les imaginer cédant à une illusion collective.
    • Le phénomène se poursuit tout le mois d’avril, avec un redoublement lors des Rameaux et de Pâques. Un signalement est fait à l’évêque, qui diligente une enquête.
    • Le 11 avril, deux incroyants venus se moquer de ce qu’ils jugent un délire collectif sont à leur tour témoins de la chose et en sont tellement frappés qu’ils tombent à genoux et croient.
    • En cette fin de carême et durant le temps pascal, des dizaines de milliers de personnes accourent de toute l’Espagne à Limpias. On estime ces foules à plus de 120 000 personnes ; parmi elles, ecclésiastiques, prêtres, religieux, évêques (dont l’archevêque de Cuba, sur le point de rembarquer pour son île), universitaires, scientifiques, politiques, médecins, aristocrates, gens du peuple, croyants et athées. Tous ne voient pas, mais ils sont plusieurs milliers à être témoins non seulement du mouvement des paupières, mais aussi de bien d’autres étrangetés : après la sueur, qui continue de couler, ce sont des larmes, de la salive et du sang que le Christ répand. Ces phénomènes sont observés par des milliers de personnes, dont 8 000 témoigneront par écrit, attestant de leur bonne foi sur le salut de leur âme.
    • Un visiteur décrit ainsi la scène à laquelle il assiste : « Je voyais que sa bouche était pleine de sang qu’il tentait de vomir car il l’étouffait. Sa poitrine se souleva, puis s’affaissa dans une suprême tentative pour respirer ; les narines se dilatèrent comme s’il cherchait l’air qui lui manquait. Dans l’effort qu’il fit, une épine de la couronne s’enfonça dans sa tempe gauche et du sang en coula… » Les symptômes qu’il décrit sont ceux de la lente asphyxie des crucifiés, et l’épanchement de sang par la bouche, visible sur le linceul de Turin, correspond aux effets de la péricardite provoquée par la flagellation qui précipita la mort de Jésus. Or, ce témoin ne possède pas ces informations et ne peut donc pas les inventer dans une hallucination ou une mise en scène, plus ou moins consciente.
    • De nombreuses vérifications seront opérées très sérieusement à la demande des autorités religieuses. Aucune fraude ne sera jamais décelée. Les manifestations miraculeuses se poursuivent par périodes, pendant plusieurs années, en se raréfiant.
    • L’Église ne s’est jamais prononcée sur le caractère surnaturel des événements, mais elle a célébré en 2019 leur centenaire, ce qui est une façon de les cautionner.
    • Devenu célèbre dans le monde entier, Limpias est toujours un lieu de pèlerinage. Miracles de guérisons et de conversions n’y ont jamais cessé.

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  • La vérité cachée derrière le spectacle du lavement des pieds; une homélie du Pape Benoît XVI

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    De Sandro Magister sur Settimo Cielo (en français sur diakonos.be) :

    La vérité cachée derrière le spectacle du lavement des pieds. Une homélie du Pape Benoît XVI

    (S.M.) Ne cherchez pas la messe « in coena Domini » du soir du Jeudi Saint dans le calendrier des célébrations pascales de cette année publié par le Vatican fin mars dernier.

    C’est d’ailleurs le cas depuis que Jorge Mario Bergoglio est devenu pape. L’information du lieu où il célébrerait, en général dans une prison, n’était donnée qu’en dernière minute. Et l’information ne concernait pas tant la messe elle-même que le lavement des pieds qu’il aurait pratiqué à douze détenus ou immigrés, hommes et femmes, chrétiens, musulmans, qu’ils aient la foi ou pas.

    Quant aux homélies prononcées pour la circonstance par le Pape François, elles aussi reflétaient la priorité absolue donnée au lavement des pieds. Elles tenaient souvent en peu de mots, souvent improvisées, et se réduisaient généralement à une exhortation au pardon et au service fraternel.

    Les médias ne faisaient habituellement pas la moindre allusion à la messe en elle-même. Et pourtant, la messe du Jeudi saint est une pierre angulaire de la liturgie chrétienne, s’agissant de la mémoire de la dernière Cène de Jésus avec ses apôtres (dans l’illustration, un détail d’une fresque de Giotto de 1303), la première de toutes les messes passées, présentes et à venir.

    Et cette année encore, étant données les conditions de santé précaires du Pape François, la question que tout le monde se posait était de savoir qui aurait célébré le lavement des pieds à sa place, à quel endroit — avec un remplaçant qu’on a laissé tomber en dernière minute — et surtout si le Pape comptait faire une apparition en personne sur la scène.

    Mais pourquoi ne pas remettre en lumière ce que la métamorphose du Jeudi saint opérée par le Pape actuel a occulté ? Pourquoi ne pas revenir au cœur authentique de la messe « in coena Domini » ?

    Ce qui va suivre est tiré de l’homélie prononcée le Jeudi saint 2008 par le Pape Benoît XVI, qui la célébrait toujours dans la cathédrale de Saint-Jean-de-Latran.

    Cette homélie s’appuie sur l’extrait de l’Évangile de Jean que l’on proclame à cette messe qui, en lieu et place du récit de la Dernière Cène, présente celui de Jésus qui lave les pieds de ses apôtres. Mais ce que le Pape Benoît XVI en tire comme enseignement est sans comparaison avec la superficialité du spectacle en vogue ces dernières années.

    On s’accorde généralement pour dire que l’homélitique a été un point fort du pontificat de Joseph Ratzinger. Et Settimo Cielo en a déjà expliqué la raison, dans sa présentation d’un livre qui recueillait pour la première fois en 2008 une année de prédication liturgique de ce pape.

    Cette homélie en est une preuve éclatante. Bonne lecture et joyeuses Pâques !

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  • Une homélie de Jean-Paul II pour le Jeudi Saint

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    MESSE DE LA CÈNE DU SEIGNEUR

    HOMÉLIE DU SAINT PÈRE JEAN PAUL II

    Jeudi 12 avril 2001

    source

    1. "In supremae nocte Cenae / recumbens cum fratribus... - La nuit de la dernière Cène, / assis à table avec les siens..., / de ses propres mains / il donne lui-même la nourriture aux Douze".

    C'est avec ces paroles que l'hymne suggestif du "Pange lingua" présente la Dernière Cène, au cours de laquelle Jésus nous a laissé l'admirable Sacrement de son Corps et de son Sang. Les lectures qui viennent d'être proclamées en illustrent le sens profond. Elles composent presque un tryptique:  elles présentent l'institution de l'Eucharistie, sa préfiguration dans l'Agneau pascal, sa traduction existentielle dans l'amour et le service aux frères.

    C'est l'Apôtre Paul, dans la première Lettre aux Corinthiens, qui nous rappelle ce que Jésus a fait "la nuit où il fut trahi". Paul a ajouté un commentaire personnel au récit des faits historiques:  "Chaque fois en effet que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne" (1 Co 11, 26). Le message de l'Apôtre est clair:  la communauté qui célèbre la Cène du Seigneur rend la Pâque actuelle. L'Eucharistie n'est pas la simple mémoire d'un rite passé, mais la représentation vivante du geste suprême du Sauveur. Cette expérience ne peut que pousser la communauté chrétienne à devenir la prophétie d'un monde nouveau, inauguré dans la Pâque. Ce soir, en contemplant le mystère d'amour que la Dernière Cène nous repropose, nous restons nous aussi dans une adoration émue et silencieuse.

    2. "Verbum caro, / panem verum verbo carnem efficit... Le Verbe incarné / à travers sa parole transforme / le pain véritable en sa chair...".

    C'est le prodige que nous, les prêtres, nous constatons chaque jour de nos mains lors de la Messe! L'Eglise continue à répéter les paroles de Jésus, et elle sait qu'elle est engagée à le faire jusqu'à la fin du monde. En vertu de ces paroles, un changement merveilleux s'accomplit:  les espèces eucharistiques demeurent, mais le pain et le vin deviennent, selon l'heureuse expression du Concile de Trente, "véritablement, réellement et substantiellement" le Corps et le Sang du Seigneur.

    L'esprit se sent perdu face à un mystère aussi sublime. De nombreuses interrogations prennent forme dans le coeur du croyant, qui trouve cependant la paix dans la Parole du Christ. "Et si sensus deficit / ad firmandum cor sincerum sola fides sufficit - Si le sens se perd, / la foi suffit à elle seule à un coeur sincère". Soutenus par cette foi, par cette lumière qui illumine nos pas, également dans la nuit du doute et des difficultés, nous pouvons proclamer:  "Tantum ergo Sacramentum / veneremur cernui - Un aussi grand sacrement / nous vénérons donc, prosternés".

    3. L'institution de l'Eucharistie se rattache au rite pascal de la première Alliance, qui nous a été décrit dans la page de l'Exode qui vient d'être proclamée:  on y parle de l'agneau "un mâle sans tare, âgé d'un an" (Ex 12, 6), dont le sacrifice devait sauver le peuple de la destruction:  "Le sang sera pour vous un signe sur les maisons où vous vous tenez. En voyant ce signe, je passerai outre et vous échapperez au fléau destructeur" (12, 13).

    L'hymne de saint Thomas commente:  "et antiquum documentum / novo cedat ritui - que la vieille Loi cède à présent la place / au Sacrifice nouveau". C'est pourquoi les textes bibliques de la Liturgie de ce soir orientent, à juste titre, notre regard vers le nouvel Agneau, qui en versant librement son sang sur la Croix a établi une Alliance nouvelle et définitive. Voilà l'Eucharistie, présence sacramentelle de la chair immolée et du sang versé du nouvel Agneau. A travers celle-ci le salut et l'amour sont offerts à toute l'humanité. Comment ne pas être fascinés par ce Mystère? Nous faisons nôtres les paroles de saint Thomas d'Aquin:  "Praestet fides supplementum sensuum defectui - Que la foi pallie au défaut des sens". Oui, la foi nous conduit à l'émerveillement et à l'adoration!

    4. C'est à ce point que notre regard se tourne vers le troisième élément du tryptique qui compose la liturgie d'aujourd'hui. Nous le devons au récit de l'évangéliste Jean, qui nous présente l'icône bouleversante du lavement des pieds. Par ce geste Jésus rappelle à ses disciples de tous les temps que l'Eucharistie demande à être témoignée à travers le service d'amour envers les frères. Nous avons écouté les paroles du divin Maître:  "Si donc je vous ai lavé les pieds, moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres" (Jn 13, 14). C'est un nouveau style de vie qui découle du geste de Jésus:  "Car c'est un exemple que vous ai donné, pour que vous fassiez, vous aussi, comme moi j'ai fait pour vous" (Jn 13, 15).

    Le lavement des pieds se présente comme un acte exemplaire, qui dans la mort sur la croix et la résurrection du Christ trouve sa clef de lecture et sa formulation la plus élevée. Dans cet humble acte de service, la foi de l'Eglise voit l'issue naturelle de toute célébration eucharistique. L'authentique participation à la Messe ne peut qu'engendrer l'amour fraternel, que ce soit dans chaque croyant ou dans la communauté ecclésiale tout entière.

    5. "Il les aima jusqu'à la fin" (Jn 13, 1). L'Eucharistie constitue le signe éternel de l'amour de Dieu, un amour qui soutient notre chemin vers la pleine communion avec le Père, à travers le Fils, dans l'Esprit. Il s'agit d'un amour qui dépasse le coeur de l'homme. En nous arrêtant ce soir pour adorer le Très Saint Sacrement, et en méditant le mystère de la Dernière Cène, nous nous sentons plongés dans l'océan d'amour qui jaillit du coeur de Dieu. L'âme emplie de gratitude, nous faisons nôtre l'hymne de grâce du peuple des rachetés: 

    "Genitori Genitoque / laus et iubilatio.... - Au Père et au Fils / louange et joie, / salut, puissance, bénédiction:  / à Celui qui procède des deux, / même gloire et honneur!" Amen!

  • Il y a cinquante ans, le cauchemar des Khmers rouges commençait au Cambodge

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    De Stefano Magni sur la NBQ :

    Il y a cinquante ans, le cauchemar des Khmers rouges commençait au Cambodge

    Le 17 avril 1975, Phnom Penh, la capitale du Cambodge, tombe aux mains des Khmers rouges. Les communistes maoïstes intransigeants ont soumis la population à une gigantesque expérience sociale qui a entraîné deux millions de morts en trois ans.

    17_04_2025

    Victimes des Khmers rouges à Tuol Sleng (La Presse)

    Le 17 avril, il y a 50 ans, Phnom Penh tombait. La capitale du Cambodge est tombée aux mains des Khmers rouges, le mouvement communiste maoïste le plus meurtrier de l'histoire. Au cours des trois années suivantes, le régime, dirigé d’une main de fer par Pol Pot, éliminera un tiers de sa propre population. Son objectif déclaré était de réaliser l’utopie communiste d’ici 1990, peu importe les méthodes utilisées ou le nombre de morts.

    L'arrivée au pouvoir des Khmers rouges intervient après huit années de guerre civile . C'est surtout la guerre du Vietnam qui a détruit l'équilibre déjà précaire de cette région d'Asie du Sud-Est, indépendante de la France en 1953. Le prince Sihanouk, qui avait succédé pacifiquement à la France, était tiraillé entre le communisme (qui se répandait dans toute la région) et une alliance avec les États-Unis, protecteurs du Sud-Vietnam. Lorsque le Nord-Vietnam communiste a commencé à envahir le Sud-Vietnam (nationaliste) en 1959, en infiltrant son armée et ses guérilleros, Sihanouk n'a pas pu ou n'a pas voulu s'y opposer. En 1965, première année de l’intervention américaine au Vietnam, le Cambodge était déjà devenu le principal lieu de transit des Nord-Vietnamiens. Étant un pays neutre, ils ne pouvaient pas être touchés par les Américains et les Sud-Vietnamiens. Sihanouk a violemment réprimé le communisme dans son pays. Dans la seule révolte paysanne du district de Samlaut (qui a éclaté à la suite d'expropriations arbitraires), de 1967 à 1970, il a tué 12 000 personnes. Les militaires coupèrent les têtes des agriculteurs et les envoyèrent à Phnom Penh comme preuve du travail accompli. C'est durant cette période, en opposition au régime, que se développe le mouvement armé des Khmers rouges, inspiré par le maoïsme le plus intransigeant. Mais en politique étrangère, Sihanouk lui-même s'est rapproché de la Chine de Mao et de l'URSS de Brejnev et a rompu avec les Américains.

    En 1970, alors que Sihanouk était à Moscou en visite d’État, l’armée prit le pouvoir. Lon Nol, l’un des pires bourreaux de la répression de Samlaut, devient président, dictateur de facto, de la nouvelle « République khmère ». Il a promis de lutter contre la corruption et d’expulser les Vietnamiens et a immédiatement demandé aux États-Unis d’intervenir pour l’aider. En un mois, Nixon autorisa une intervention terrestre secrète sur le territoire cambodgien. Sur le plan militaire, ce fut un succès : les Nord-Vietnamiens furent chassés des zones frontalières. Politiquement, ce fut un désastre : les communistes de Ho Chi Minh se dispersèrent à travers le pays et enseignèrent aux Khmers rouges comment se battre contre une armée régulière. Lon Nol s’est encore davantage aliéné la population, tout d’abord parce qu’il s’est montré encore plus corrompu que son prédécesseur. Puis, parce qu’il était encore plus violent, il persécuta tous les Vietnamiens du pays, les catholiques et les autres minorités religieuses et réprima dans le sang toute manifestation de dissidence. Les monarchistes et les communistes s'allièrent contre lui : Sihanouk et les Khmers rouges formèrent un Front d'unité nationale. En 1973, ils contrôlaient déjà la moitié du pays et Lon Nol demanda à nouveau l'aide américaine. Nixon autorisa une campagne de bombardements (également secrète) au cours de laquelle des dizaines de milliers de civils, en plus des guérilleros, périrent. Ce fut un succès éphémère : l'avancée des communistes ne fut que temporairement enrayée, mais en réaction aux bombardements les populations paysannes s'engagèrent en masse dans les rangs des Khmers rouges, même s'il était désormais clair, dans les zones qu'ils avaient occupées, que leur régime était bien plus meurtrier que le régime nationaliste de Lon Nol.

    En avril 1975, alors que le Sud-Vietnam était sur le point d’être submergé par le Nord et que les Américains étaient partis depuis longtemps, les Khmers rouges remportèrent la guerre civile. Sihanouk est resté officiellement chef de l’État pendant une année supplémentaire, puis a été placé en résidence surveillée. Le Kampuchea démocratique est né, Khieu Samphan en est le président, mais le véritable homme aux commandes est le Premier ministre, chef du mouvement communiste armé, Saloth Sar, connu sous le nom de Pol Pot. Formé à Paris (il eut Jean Paul Sartre comme mentor), il voulut créer l'utopie communiste dès le premier jour de son règne. Toutes les villes, à commencer par Phnom Penh, ont été évacuées d’urgence. Même les malades et les blessés admis dans les hôpitaux étaient jetés dans la rue. Les nouvelles autorités ont indiqué aux évacués qu'il s'agissait d'une mesure temporaire et qu'il s'agissait d'apporter le strict minimum. En réalité, ils étaient destinés à participer à une expérience sociale gigantesque : transformer des citoyens en paysans. Les évacuations, menées selon des méthodes de déportation, ont coûté des dizaines de milliers de victimes. Et ce n’était que le début de la souffrance.

    L’ensemble de la population cambodgienne a été réorganisée en communautés paysannes. Il n’y avait aucune liberté de mouvement possible : ils étaient en fait des prisonniers dans des camps de travail. Les quarts de travail variaient de 12 à 14 heures par jour, sans aucune pause, sauf pour subir un lavage de cerveau idéologique lors de séances de rééducation. Tous les membres de l’ancien régime et leurs familles ont été exterminés. Toutes les personnes religieuses, quelle que soit leur religion, ont été tuées. Pour le reste, chaque commandant et fonctionnaire local avait droit de vie et de mort sur ses paysans. Les plus sadiques et les plus méfiants tuaient même ceux qui portaient simplement des lunettes, symbole de la dégénérescence bourgeoise. Quiconque était considéré comme « paresseux » dans le travail des champs, qui n’avait pas suffisamment de callosités sur les mains, qui ne répondait pas de manière appropriée aux séances de rééducation, qui connaissait des langues étrangères ou qui exerçait des professions libérales avant l’an zéro de la nouvelle ère pouvait également être tué.

    Parler à la première personne du singulier n'était pas autorisé : le je était banni. L'affection personnelle n'était pas autorisée : les mots doux et les gestes affectueux étaient interdits et punis. Seule la fête devait être aimée. À partir du début de 1977, les mariages étaient arrangés uniquement par des cadres du parti, entre des hommes et des femmes qui ne se connaissaient pas. Les enfants ont été séparés de leurs parents et éduqués par le parti. Tout était partagé, les récoltes étaient enregistrées, la nourriture était rationnée et consommée dans des cantines collectives. La mort par inanition devint la règle et les paysans qui tentaient de voler de la nourriture ou de la consommer pendant qu'ils la cultivaient étaient condamnés à mort.

    Même les cadres et les dirigeants khmers n’étaient pas à l’abri de la peur. Il y a eu de nombreuses tentatives de coup d’État, au moins neuf en trois ans. Pol Pot a réagi en procédant à des purges périodiques. Les principales victimes furent les communistes de retour de l’étranger, encouragés par la propagande de Phnom Penh. Presque tous ont fini sous la hache de la répression. La prison de Tuol Sleng, destinée aux purgés, est devenue le symbole de l'extermination cambodgienne, le seul endroit où l'identité des victimes et la date de leur exécution étaient documentées en détail. Presque tous les détenus de Tuol Sleng ont été tués, soit par des pelotons d’exécution, soit dans des chambres de torture.

    Le régime khmer était également profondément raciste. Malgré l'alliance avec Pékin, il extermina presque tous les Chinois vivant au Cambodge (environ 200 000 périrent dans ce génocide dans le génocide), la minorité musulmane Cham et des dizaines de milliers de Vietnamiens. Et c’est précisément pour sauver ce dernier de l’anéantissement que, fin 1978, le Vietnam envahit le Cambodge. En un peu plus d’un mois, il a balayé le régime infernal. Mais la liberté n'est pas revenue dans le pays, un autre régime communiste a été établi, dirigé par Samrin (un ancien Khmer rouge qui a fui au Vietnam) et seulement moins répressif et meurtrier que le précédent. C’est pourquoi il est si difficile, encore aujourd’hui, de faire la lumière sur l’immense crime des Khmers rouges et de punir les responsables. Faire table rase du passé n’efface cependant pas les deux millions de morts, assassinés en seulement trois ans, avec une intensité sans précédent. Tués au nom d’une utopie, d’un paradis sur terre qui garantissait l’enfer à tout un peuple.

  • Sermon de saint Augustin pour le Jeudi Saint

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    Jeudi Saint (source) :

           Le sermon LI de Saint Augustin dans le supplément pour les fêtes de l’année s’intitule « Pour la Cène du Seigneur », mais, de fait, la Sainte Eucharistie n’y est évoquée qu’incidemment parce que l’essentiel de ce sermon met en valeur la trahison de Judas et son hypocrisie, opposé au reniement de Pierre et à sa contrition.
    Saint Augustin tire profit des exemples opposés de ces deux apôtres pour mettre en évidence de quelles dispositions les fidèles doivent être revêtus pour approcher de la Sainte Table.

    Puissiez-vous apporter à la manducation de l’Agneau une innocence d’agneau !

    § 1. Exhortation à s’approcher des saints mystères avec une conscience purifiée.

       Vous êtes venus en grand nombre pour prendre part au banquet de ce jour, pour assister à l’immolation de l’Agneau et faire la Pâque avec les disciples de Jésus-Christ ; or, je vous en conjure, apportez aux divins mystères des cœurs sincères et remplis de charité ; qu’il n’y ait dans vos âmes aucune duplicité, que le nuage de l’envie ne projette point son ombre sur votre homme intérieur ; puissiez-vous apporter à la manducation de l’Agneau une innocence d’agneau ! Puisse la brebis immaculée ne point former en vous des membres de loup ! Car celui qui s’assied à cette table et y participe indignement, n’arrivera pas avec Pierre au port du salut, mais il fera avec Judas un irrémédiable naufrage ; il subira la peine due à son crime, comme ce traître qui a reçu le bienfait du Seigneur avec une conscience coupable. Enfin Judas n’a apporté à la cène aucune franchise, il n’y a mis que de la dissimulation ; aussi, dès qu’il a eu reçu, de la main du Christ, le morceau de pain trempé, le diable est-il entré en lui.

    § 2. Effroi et inquiétude des disciples à l’annonce de la trahison.

       Je veux, mes frères, examiner pieusement avec vous les premiers passages de la lecture que vous venez d’entendre : « Le Seigneur était à table avec Ses douze disciples ; et, comme ils mangeaient, Il leur dit : Je vous le dis en vérité, l’un de vous Me trahira ; et ils furent contristés, et chacun d’eux commença à Lui dire : Est-ce moi, Seigneur ? » (Matth. XXI, 20-22).
    Heureux Apôtres ! vous vous chagrinez parce que vous êtes innocents, mais votre sort est plus digne d’envie que celui de Judas ; car si son audace l’empêche de rougir, elle sera exemplairement punie ; ne savez-vous pas, en effet, que jamais vous n’avez formé contre le Sauveur un pareil projet ? Vous vous tenez en garde contre votre propre fragilité, aussi vous devenez tristes et vous questionnez votre Maître sur une faute que votre conscience ne vous reproche pas. Mais vous en croyez plus à Lui qu’à vous. Vous supposez que l’accusation portée an milieu de ce repas tombe sur vous, et Judas ne veut point sentir le trait qui vient de le frapper. Vous tombez dans l’épouvante, rien qu’à entendre cette accusation, et celui qui a conçu un tel crime demeure paisible. Consultez donc votre Seigneur, interrogez votre bon Maître. Il est la vérité même, Il prévoit tout ; qu’Il vous réponde. Oui ! qu’Il désigne l’abominable personnage, et que l’accusation ne pèse plus sur tous ; qu’Il vous indique celui que vous devez fuir ; qu’Il nomme hautement le fils de perdition, afin que l’assemblée, malgré son innocence, ne reste pas sous le poids du soupçon.

    § 3.  Effronterie de Judas.

       « Jésus », dit l’Evangile, « leur répondit : Celui qui porte la main vers le plat avec Moi, Me trahira » (Matth. XXI, 23). Voilà déjà quelque chose de plus clair ; cependant, je ne vois encore citer aucun nom propre. Les Apôtres s’arrêtent interdits, ils cessent de manger ; mais, avec la témérité et l’effronterie qui le distinguent, Judas avance la main vers le plat avec son Maître ; il veut, par son audace, simuler une bonne conscience. Il a entendu, sans rougir, ce que le Maître a dit de lui, et il continue à manger ; sa conscience vient d’être mise à nu, et il n’en porte pas moins encore la main au plat. Bien qu’averti une fois, deux fois, il ne recule pas devant la trahison ; au contraire, son impudence trouve un aliment dans la longanimité du Sauveur, et il se prépare un trésor de colère pour le jour de la colère (Rom. II, 5).
    Alors Jésus lui annonce la punition qui l’attend, afin que la prédiction du châtiment le ramène au bien, puisque des miracles n’ont pu le détourner du mal : « Le Fils de l’homme s’en va, selon ce qui est écrit de Lui ; mais malheur à celui par qui le Fils de l’homme sera trahi ! Il vaudrait mieux pour lui qu’il ne fût jamais né. – Judas, celui qui Le trahissait, répondant, lui dit : Maître, est-ce moi ? » (Matth. XXI, 24-25).
    Judas, à qui dis-tu : « Est-ce moi ? » Dis plutôt : « C’est moi ! » De toute éternité, Il sait que c’est toi. S’Il te parle ainsi maintenant, ce n’est, de Sa part, ni oubli ni ignorance ; c’est bonté et pitié pour toi. Prévaricateur misérable et corrompu, si tu rentrais en toi-même, tu te rappellerais, parce que tu l’as appris, que ton Maître connaît l’avenir et que rien ne saurait Lui être caché ; donc, encore une fois, s’Il te parle ainsi, ce n’est point chez Lui l’effet de l’ignorance ; Il n’a d’autre but que de t’exciter au repentir. Mais comme la cupidité t’a fait perdre le sens, comme l’avarice a rendu ton coeur aveugle, tu fais semblant de demander si c’est toi qui aurais conçu le crime de trahison. Sa Divinité connaît toutes les pensées de ton âme ; mais malheur à toi, car tu as perdu tout sentiment d’humanité et tu ne sais plus que singer la charité !

    § 4. Annonce de la chute de Pierre.

       « Après avoir récité un hymne, ils s’en allèrent à la montagne des Oliviers, et Jésus leur dit : Vous serez tous scandalisés, cette nuit, à cause de Moi. Pierre, répondant, Lui dit : Quand tous les autres seraient scandalisés à cause de Vous, moi, je ne le serai jamais. Jésus lui dit : Je te le dis en vérité, cette nuit, avant que le coq chante, tu me renieras trois fois. Pierre Lui dit : « Quand il me faudrait mourir avec vous, je ne vous renierai pas » (Matth. XXI, 30-35).
    Voilà donc une discussion engagée entre deux, entre le médecin et le malade ; celui-ci se croyait parfaitement sain, Celui-là lui annonçait qu’il se chaufferait à l’âtre du feu du prétoire ; mais laissons cela de côté pour un instant, et jusqu’au dénouement de l’affaire.

    § 5. Judas profane le geste de l’amitié et de la paix.

       « Judas, qui Le leur livrait, leur avait donné ce signe : Celui que j’embrasserai, c’est Lui, arrêtez-Le » (Matth. XXI, 48).
    Qu’avez-vous entendu, mes frères ? Qui pourrait, sans frémir, penser à pareille chose ? Quelles oreilles seraient capables de supporter un tel langage ? Quel cœur ne se révolterait à l’entendre ? « Il leur avait donné ce signe : Celui que j’embrasserai, c’est Lui, arrêtez-Le ». O signalement sacrilège ! O criminelle convention ! O contrat digne de tous les châtiments ! En vertu de cette entente, la guerre commence par un baiser ; le symbole de la paix sert à briser les liens sacrés de la concorde, et le profane Judas a voulu commencer les hostilités par ce que les nations emploient d’ordinaire pour les finir !
    « Il leur avait donné ce signe : Celui que j’embrasserai, c’est Lui, arrêtez-Le ». Judas, tu as donné ce signe ; ton mauvais génie n’a rien trouvé de mieux que cette convention d’après laquelle on enlèverait ton Maître pour Le faire cruellement souffrir, au moment même où tu ferais la paix avec Lui ! A cause de toi, beaucoup se sentiront glacés d’épouvante ; car ils craindront de n’avoir qu’une paix simulée avec leur prochain. Ce cou scélérat, que tu étends aujourd’hui pour embrasser le Christ, tu le relèveras demain, tu l’allongeras, pour te pendre. Tu as appris, pour ton malheur, à compter de l’argent ; car bientôt tu supputeras le poids de ton propre corps.

    § 6. Arrestation de Notre-Seigneur. Trahison et relèvement de Pierre.

       Sur ces entrefaites, on saisit le Sauveur, pour Le conduire chez le prince des prêtres. Tandis que les autres disciples s’esquivent honteusement, Pierre, le faiseur de belles promesses, s’écarte d’abord assez loin ; puis il arrive lui-même près de la maison du prince, et, dans l’attente du dénouement de l’affaire, il se met à regarder dans le porche.
    Comme il faut que s’accomplisse incessamment la prédiction relative à l’âtre de feu du prétoire, il s’approche pour s’y chauffer. Saisi de crainte, il renie le Christ pour qui il avait promis même de mourir ; il gît, brisé dans la torpeur de l’oubli comme dans un lit de douleur ; une vieille femme décrépite, comme une fièvre violente, a brisé ses forces ; un sommeil léthargique s’est emparé de lui ; mais voilà que tout à coup la voix matinale du crieur vient frapper ses oreilles.
    Enfin il s’éveille, il entend le chant du coq, il se voit grièvement blessé. Pareilles à des messagers, ses larmes portent à son médecin l’expression de sa douleur, et aussitôt il reçoit le remède divin. C’est à lui que s’applique cette parole de l’Ecriture : « Mes compagnons et Mes proches se sont approchés de Moi, et Mes amis se sont tenus au loin » (Ps. XXXVII, 12) ; et cette autre : « Les blessures d’un ami sont salutaires, les baisers d’un ennemi sont envenimés » (Prov. XXVII, 6).
    De même que l’apôtre Judas est devenu traître, de même est-il devenu ennemi, d’ami qu’il était ; car il a été écrit de lui : « L’homme de Ma paix, de Ma confiance, qui mangeait à Ma table, a levé le pied contre Moi » (Ps. XL, 10 & Jean XIII, 14). Et encore : « Les ennemis de l’homme, ce seront ses serviteurs » (Mich. VII, 6 &  Matth. X, 38).

    C’est pourquoi, mes frères, nous devons tous éviter avec soin les discours trompeurs, afin de partager le bonheur éternel avec les saints. Conservons la véritable paix et la croyance à l’unité perpétuelle de la Trinité ; alors nous mériterons d’être admis dans le royaume des cieux et de rendre grâces à Notre-Seigneur Jésus-Christ, pendant les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

  • Méditation pour le Jeudi Saint

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    Du site de l'Opus Dei :

    Méditation : Jeudi Saint

    Les thèmes proposés pour la méditation du jour sont : Jésus lave les pieds de ses apôtres ; Dieu se donne à nous dans l’Eucharistie ; reconnaissance pour l’Eucharistie et le sacerdoce.

    - Jésus lave les pieds de ses apôtres

    - Dieu se donne à nous dans l'Eucharistie

    - Reconnaissance pour l'Eucharistie et le sacerdoce


    « AVANT la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout » (Jn13, 1). Ce verset de saint Jean annonce au lecteur de son Évangile que quelque chose de grand arrivera ce jour-là. C’est un préambule tendrement affectueux. […] Nous commençons par demander dès maintenant au Saint-Esprit de nous préparer à comprendre chaque geste et chaque expression de Jésus-Christ » [1]. Grâce à notre attention personnelle, nous pouvons penser aujourd’hui au geste que Jésus a fait en lavant les pieds des apôtres.

    Lors de la Dernière Cène, la Passion étant imminente, l’atmosphère était toute d’amour, d’intimité, de recueillement. « Jésus, sachant que le Père a tout remis entre ses mains, qu’il est sorti de Dieu et qu’il s’en va vers Dieu, se lève de table, dépose son vêtement, et prend un linge qu’il se noue à la ceinture ; puis il verse de l’eau dans un bassin. Alors il se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture » (Jn 13, 3-5). Ce geste a assurément eu un fort impact sur les apôtres, puisqu’il était réservé aux serviteurs. Vraisemblablement ils n’en ont compris la portée que plus tard. Nous-mêmes, nous pouvons avoir du mal à imaginer Dieu dans une telle attitude, nettoyant de ses mains la poussière du chemin.

    Se laisser laver les pieds par le Christ implique de reconnaître que ce n’est pas nous qui nous rendons purs, propres ou saints. « Et cela est difficile à comprendre. Si je ne permets pas que le Seigneur soit mon serviteur, que le Seigneur me lave, me fasse grandir, me pardonne, je n’entrerai pas dans le Royaume des Cieux » [2]. « Dieu nous a sauvés en nous servant. En général nous pensons que c’est à nous de servir Dieu. Non, c’est lui qui nous a servi gratuitement, parce qu’il nous a aimé en premier. Il est difficile d’aimer sans être aimés. Et il est encore plus difficile de servir si nous ne nous laissons pas servir par Dieu » [3]. Tel est le paradoxe chrétien : Dieu prend les devants, c’est lui qui prend l’initiative. D’où l’importance, avant d’entreprendre toute démarche apostolique, d’apprendre à accueillir ce que Dieu veut bien nous donner, à nous laisser purifier et purifier encore par sa main.


    SI LE GESTE de Jésus lavant les pieds de ses apôtres nous surprendra toujours, son amour et son humilité atteignent des sommets lorsque, au cours de la Cène, il « prit du pain puis, ayant rendu grâce, il le rompit, et dit : “Ceci est mon corps, qui est pour vous. Faites cela en mémoire de moi”. Après le repas, il fit de même avec la coupe, en disant : “Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang. Chaque fois que vous en boirez, faites cela en mémoire de moi” » (1 Cor 11, 23-25).

    Le Seigneur « a institué ce sacrement comme mémorial perpétuel de sa passion, comme accomplissement des anciennes figures, comme le plus grand miracle qu’il ait accompli et la plus grande consolation pour ceux qu’il laissera attristés par son absence » [4]. Il se donne Lui-même à nous : le pain et le vin se transforment en son corps et en son sang : une marque de son amour surabondant et la plus grande expression possible d’humilité. Le Sacrement eucharistique nous permet de nous identifier à notre bien-aimé, de ne faire qu’un avec lui, dans une fusion, de plonger en Dieu. Saint Josémaria signalait que « notre Seigneur Jésus-Christ, comme si toutes les autres preuves de la miséricorde n’avaient pas été suffisantes, institue l’Eucharistie pour que nous puissions l’avoir toujours près de nous et parce que — dans la mesure où nous pouvons comprendre — celui qui n’a besoin de rien, ne veut pas se passer de nous. La Trinité s’est éprise de l’homme » [5].

    Nous en serons toujours étonnés. Nous avons beau penser à tous les dons de Dieu le Père, nous n’arriverons jamais à le comprendre. « C’est le médicament de l’immortalité, l’antidote pour ne pas mourir, le remède pour vivre en Jésus-Christ pour toujours » [6]. Nous ne méritons pas une telle sollicitude, tant d’affection et d’attention. Nous cherchons à le payer de retour, mais, même pour cela, nous avons besoin de son aide. « Le christianisme n’est pas une sorte de moralisme, un simple système éthique. Ni notre action ni notre capacité morale n’en sont à l’origine. Le christianisme est avant tout un don : Dieu se donne à nous, il ne donne pas quelque chose, mais il se donne lui-même. […] De ce fait l’acte central de l’être chrétien est l’Eucharistie : la gratitude d’avoir été gratifié, la joie pour la vie nouvelle qu’il nous donne » [7].


    DANS LES MOTS que le prêtre récite avant la consécration, « en te rendant grâce il le bénit, il le rompit et le donna à ses disciples, en disant », nous retrouvons la disposition reconnaissante du cœur de Jésus face à Dieu le Père. Nous, nous voulons avoir la même attitude que Jésus. Il est facile que de la reconnaissance jaillisse la générosité pour répandre la vie nouvelle que nous avons reçue. Nous chercherons à aimer ceux qu’il aime et comme il les aime : « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres » (Jn 13, 34). Par le Christ, avec lui et en lui, nous sommes capables d’aimer jusqu’au bout. Comme Jésus, nous nous mettons à genoux devant les hommes pour leur laver les pieds. Nous comprendrons leurs misères et nous les porterons sur nos épaules.

    Ainsi, point de jugement, de jalousie ou de comparaison, mais plutôt l’intercession, la joie et la gratitude envers Dieu pour les merveilles qu’il accomplit chez les autres. « La sainte Eucharistie contient tout le trésor spirituel de l’Église, c’est à dire le Christ lui-même, lui notre Pâque, lui le pain vivant, lui dont la chair, vivifiée par l’Esprit-Saint et vivifiante, donne la vie aux hommes » [8]. Nous en tirons force et vie pour les apporter jusqu’au dernier recoin de la terre, jusqu’au cœur de tous ceux qui nous entourent.

    Ce jour, où Dieu a fait don à l’Église de ce sacrement, nous fournit aussi l’occasion de prier pour la sainteté des prêtres, afin qu’ils servent chaque jour l’Église avec le même amour que le Seigneur. Par notre prière, nous pouvons les aider à accomplir le désir qui les anime en tant que prêtres : « Nous ne choisissons pas ce que nous devons faire, mais nous sommes des serviteurs du Christ dans l’Église et nous travaillons comme l’Église nous le dit, là où l’Église nous appelle, et nous essayons d’être exactement cela : des serviteurs qui ne font pas leur propre volonté, mais la volonté du Seigneur. Dans l’Église, nous sommes véritablement des ambassadeurs du Christ et des serviteurs de l’Évangile » [9].

    Parmi tant de dons que Jésus nous a offerts aujourd’hui, nous pensons aussi à sa Mère. Nous pouvons avoir recours à elle, témoin principal du sacrifice du Christ, afin que, avec son aide, nous ayons une vie animée par la reconnaissance humble devant tous les dons reçus.


    [1]. Saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 83.

    [2]. Pape François, Homélie, 9 avril 2020.

    [3]. Pape François, Homélie, 5 avril 2020.

    [4]. Saint Thomas d’Aquin, Opuscule 57, en la fête du Corps du Christ, lect. 1-4.

    [5]Quand le Christ passe, n° 84.

    [6]. Saint Ignace d’Antioche, Épître aux Éphésiens, 90.

    [7]. Benoît XVI, Homélie, 20 mars 2008.

    [8]. Concile Vatican II, Décr. Presbyterorum ordinis, n° 5.

    [9]. Benoît XVI, Lectio divina, 10 mars 2011.