Paroles prononcées avant la messe de canonisation
Bonjour à tous ! Bon dimanche et bienvenue ! Merci !
Frères et sœurs, aujourd'hui est un jour de grande fête pour toute l'Italie, pour toute l'Église, pour le monde entier ! Et avant de commencer la célébration solennelle de la canonisation, je voulais vous saluer et vous dire quelques mots, car si cette célébration est très solennelle, c'est également un jour de grande joie ! Je veux surtout saluer les nombreux jeunes, les enfants, qui sont venus pour cette messe ! C'est vraiment une bénédiction du Seigneur : nous retrouver tous ensemble, vous qui êtes venus de différents pays. C'est vraiment un don de la foi que nous voulons partager.
Après la messe, si vous pouvez patienter un peu, j'espère venir vous saluer sur la place. Et donc, si vous êtes loin maintenant, nous espérons au moins pouvoir nous saluer...
Je salue les familles des deux bienheureux, bientôt saints, les Délégations officielles, les nombreux évêques et prêtres qui sont venus. Applaudissons-les tous, merci également à vous d'être ici ! Religieux et religieuses, l'Action catholique !
* * *
Chers frères et sœurs,
dans la première lecture, nous avons entendu une question : « [Seigneur,] qui aurait connu ta volonté, si tu ne lui avais pas donné la sagesse et si tu ne lui avais pas envoyé ton Esprit Saint d’en haut ? » (Sag 9,17). Nous l’avons entendue après que deux jeunes bienheureux, Pier Giorgio Frassati et Carlo Acutis, ont été proclamés saints, et cela est providentiel. En effet, dans le Livre de la Sagesse, cette question est attribuée précisément à un jeune homme comme eux : le roi Salomon. À la mort de David, son père, il s’était rendu compte qu’il disposait de beaucoup de choses : le pouvoir, la richesse, la santé, la jeunesse, la beauté, le royaume. Mais c’est précisément cette grande abondance de moyens qui avait fait naître en lui une question : « Que dois-je faire pour que rien ne soit perdu ? ». Et il avait compris que la seule façon de trouver une réponse était de demander à Dieu un don encore plus grand : sa Sagesse, afin de connaître ses projets et d’y adhérer fidèlement. Il s’était en effet rendu compte que c’était le seul moyen pour que chaque chose trouve sa place dans le grand dessein du Seigneur. Oui, car le plus grand risque de la vie est de la gaspiller en dehors du projet de Dieu.
Dans l’Évangile, Jésus nous parle lui aussi d’un projet auquel il faut adhérer pleinement. Il dit : « Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple » (Lc 14, 27) ; et encore : « Celui d’entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple » (v. 33). Il nous appelle, en effet, à nous lancer sans hésitation dans l’aventure qu’il nous propose, avec l’intelligence et la force qui viennent de son Esprit et que nous pouvons accueillir dans la mesure où nous nous dépouillons de nous-mêmes, des choses et des idées auxquelles nous sommes attachés, pour nous mettre à l’écoute de sa parole.
Au cours des siècles, de nombreux jeunes ont dû faire face à ce choix décisif dans leur vie. Pensons à saint François d’Assise : comme Salomon, lui aussi était jeune et riche, assoiffé de gloire et de renommée. C’est pourquoi il était parti à la guerre, dans l’espoir d’être fait ‘‘chevalier’’ et d’être couvert d’honneurs. Mais Jésus lui était apparu en chemin et l’avait amené à réfléchir à ce qu'il était en train de faire. Rentré en lui-même, il avait posé à Dieu une question simple : « Seigneur, que veux-tu que je fasse ? » [1]. Et à partir de là, revenant sur ses pas, il avait commencé à écrire une histoire différente : la merveilleuse histoire de sainteté que nous connaissons tous, se dépouillant de tout pour suivre le Seigneur (cf. Lc 14, 33), vivant dans la pauvreté et préférant à l’or, à l’argent et aux tissus précieux de son père l’amour pour ses frères, en particulier les plus faibles et les plus petits.
Et combien d’autres saints et saintes pourrions-nous rappeler ! Parfois, nous les représentons comme de grands personnages, oubliant que tout a commencé pour eux lorsqu’ils ont répondu ‘‘oui’’ à Dieu alors qu’ils étaient encore jeunes, et se sont donnés pleinement à Lui, sans rien garder pour soi. Saint Augustin raconte à ce propos que, dans le « nœud tortueux et enchevêtré » de sa vie, une voix, au plus profond de lui, lui disait : « Je te veux » [2]. Et ainsi Dieu lui a donné une nouvelle direction, une nouvelle voie, une nouvelle logique, dans laquelle rien de son existence n’a été perdu.
Dans ce contexte, nous regardons aujourd’hui saint Pier Giorgio Frassati et saint Carlo Acutis : un jeune homme du début du XXe siècle et un adolescent de notre époque, tous deux amoureux de Jésus et prêts à tout donner pour Lui.
Pier Giorgio a rencontré le Seigneur à travers l’école et les groupes ecclésiaux – l’Action catholique, les Conférences de Saint Vincent, la FUCI, le Tiers-Ordre dominicain – et en a témoigné par sa joie de vivre et d’être chrétien dans la prière, l’amitié et la charité. À tel point que, le voyant parcourir les rues de Turin avec des charrettes remplies d’aides pour les pauvres, ses amis l’avaient rebaptisé “Entreprise Transport Frassati ” ! Aujourd’hui encore, la vie de Pier Giorgio est une lumière pour la spiritualité laïque. Pour lui, la foi n’a pas été une dévotion privée : poussé par la force de l’Évangile et son appartenance à des associations ecclésiales, il s’est engagé généreusement dans la société, a apporté sa contribution à la vie politique et s’est dépensé avec ardeur au service des pauvres.
Carlo, quant à lui, a rencontré Jésus en famille, grâce à ses parents, Andrea et Antonia – présents ici aujourd’hui avec ses deux frères, Francesca et Michele – puis à l’école, lui aussi, et surtout dans les sacrements, célébrés dans la communauté paroissiale. Il a ainsi grandi, intégrant naturellement dans ses journées d’enfant et d’adolescent la prière, le sport, les études et la charité.
Pier Giorgio et Carlo ont tous deux cultivé l’amour pour Dieu et pour leurs frères à travers de simples moyens, à la portée de tous : la messe quotidienne, la prière, en particulier l’adoration eucharistique. Carlo disait : « Devant le soleil, on se bronze. Devant l’Eucharistie, on devient saint ! », et encore : « La tristesse, c’est le regard tourné vers soi-même, le bonheur, c’est le regard tourné vers Dieu. La conversion n’est rien d’autre que le déplacement du regard du bas vers le haut, un simple mouvement des yeux suffit ». Une autre chose essentielle pour eux était la confession fréquente. Carlo a écrit : « La seule chose que nous devons vraiment craindre, c’est le péché » ; et il s’étonnait parce que – ce sont toujours ses propos – « les hommes se soucient tant de la beauté de leur corps et ne se soucient pas de la beauté de leur âme ». Enfin, tous deux avaient une grande dévotion pour les saints et pour la Vierge Marie, et pratiquaient généreusement la charité. Pier Giorgio disait : « Autour des pauvres et des malades, moi je vois une lumière que nous n’avons pas » [3]. Il appelait la charité « le fondement de notre religion » et, comme Carlo, il l’exerçait surtout à travers de petits gestes concrets, souvent cachés, vivant ce que le pape François a appelé « la sainteté ‘‘de la porte d’à côté’’ » (Exhort. ap. Gaudete et exsultate, n. 7).
Même lorsque la maladie les a frappés et a fauché leurs jeunes vies, cela ne les a pas arrêtés et ne les a pas empêchés d’aimer, de s’offrir à Dieu, de le bénir et de le prier pour eux-mêmes et pour tous. Un jour, Pier Giorgio a dit : « Le jour de ma mort sera le plus beau de ma vie » [4] ; et sur la dernière photo, qui le montre en train d’escalader une montagne du Val di Lanzo, le visage tourné vers son objectif, il avait écrit : « Vers le haut » [5]. Du reste, encore plus jeune, Carlo aimait dire que le Ciel nous attend depuis toujours, et qu’aimer demain, c’est donner aujourd’hui le meilleur de nous-mêmes.
Très chers amis, les saints Pier Giorgio Frassati et Carlo Acutis sont une invitation adressée à nous tous, surtout aux jeunes, à ne pas gâcher la vie, mais à l’orienter vers le haut et à en faire un chef-d’œuvre. Ils nous encouragent par leurs paroles : « Non pas moi, mais Dieu », disait Carlo. Et Pier Giorgio : « Si tu places Dieu au centre de chacune de tes actions, alors tu iras jusqu’au bout ». Telle est la formule simple, mais gagnante, de leur sainteté. C’est aussi le témoignage que nous sommes appelés à suivre, pour goûter pleinement la vie et aller à la rencontre du Seigneur dans la fête du Ciel.
[1] Leggenda dei tre compagni, cap. I: Fonti Francescane, 1401.
[2] Les Confessions, II, 10,18.
[3]Nicola Gori, Al prezzo della vita: “L’Osservatore romano”, 11 febbraio 2021.
[4] Irene Funghi, I giovani assieme a Frassati: un compagno nei nostri cammini tortuosi: “Avvenire”, 2 agosto 2025.
[5] Ibid.